Contrat de distribution entre la France et l’Italie : quelle loi choisir?

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Élargir son réseau de distribution en France ou en Italie nécessite une connaissance du territoire, de sa culture et de sa loi applicable.

Afin de vous aider à choisir la loi la plus adaptée à vos besoins, voici une présentation didactique des points les plus pertinents à prendre en compte.

PARTIE II – CONTRAT DE DISTRIBUTION : CONCESSION COMMERCIALE ET FRANCHISE

A l’instar du droit français, le droit italien ne dispose pas de norme spécifique s’agissant des contrats de distribution.

Le code civil ainsi que la loi des parties seront donc appliqués au contrat.

Seule l’affiliation (ou franchise) fait l’objet de lois spécifiques.

Il semble donc opportun de faire un focus comparatif de ces deux législations avant de choisir la loi applicable car si l’esprit est le même, les conditions diffèrent et plus particulièrement au regard du droit communautaire pourtant commun aux deux pays.


1. L’OBLIGATION D’INFORMATION PRE-CONTRACTUELLE DANS LES CONTRATS DE FRANCHISE ET CONCESSION COMMERCIALE

En Italie comme en France, l’obligation de transmettre les informations précontractuelles à la partie intéressée à intégrer un réseau de distribution est d’ordre public.

Le tableau ci-dessous met en exergue les principales différences à connaitre impérativement avant la signature du contrat.

FRANCEITALIE
Normes des référencesLoi DOUBIN du 31 décembre 1989 codifiée aux articles L330-3 et R330-1 du code de commerce. La loi s’applique non seulement en matière de franchise mais également pour tous les contrats de distribution prévoyant une licence de marque ou d’enseigne avec exclusivité ou quasi exclusivité d’achat.Loi n°129 du 5 mai 2004 sur l’affiliation commerciale.
DénominationLa pratique utilise l’acronyme DIPAucun nom spécifique
Contenu du DIPIl est fait renvoi aux dispositions de l’article R330-1 du code de commerce qui impose un nombre d’informations bien plus important que la norme italienne.
Depuis la réforme du droit des contrats, le nouvel article 1112-1 du code civil impose un devoir général d’information précontractuelle de sorte que toute information essentielle pour déterminer le consentement de l’une des parties devra être transmise à sa demande.
Appliqué au contrat de distribution, tout élément intéressant le candidat au réseau de franchise qui n’est pas prévu par l’article R330-1 du code de commerce et essentiel à son consentement devra être transmis. La nouveauté réside dans le fait que franchiseur peut désormais solliciter du candidat toute information qu’il juge essentielle à son consentement.
a) Informations principales sur le franchiseur :
– forme de la structure juridique et capital social,
– sur demande du franchisé, les bilans des 3 dernières années ou depuis la date du début d’activité;
b) Marques:
– marques utilisées avec les extraits du registre de l’enregistrement ou dépôt,
– ou de la licence concédée au franchiseur par un tiers,
– ou la documentation prouvant l’usage concret de la marque
c) Activité du réseau
d) Affiliés : liste et variation annuelle
e) Procédures judiciaires ou arbitrales engagées contre le franchiseur depuis les 3 dernières années
Annexe au DIPProjet du contrat principalAucune
Délai de transmissionMinimum 20 jours avant la date de signature du contrat
Minimum 30 jours avant la date de signature du contrat
SanctionsNullité du contrat outre indemnisation. L’article R 330-2 du code de commerce prévoit également une sanction pénale (contravention de 5e catégorie). Nullité du contrat outre indemnisation

2. CLAUSE D’EXCLUSIVITÉS ET DE NON-CONCURRENCE POST-CONTRACTUELLE DANS LES CONTRATS DE DISTRIBUTION

A. Exclusivités

France : L’exclusivité d’approvisionnement est l’engagement du distributeur de ne s’adresser qu’à la tête de réseau ou à un fournisseur désigné. Toutefois, la durée doit être limitée à 10 ans (art. L330-1 du code de commerce).

L’exclusivité territoriale est le bénéfice exclusif d’une zone territoriale pour le distributeur.

Elle doit être écrite et indiquée dès le DIP. Elle n’est pas obligatoire.

Pour autant, dans un arrêt du 8 mars 2016 et sans remettre en cause le principe, la Cour d’Appel de Versailles a reconnu à un franchisé le bénéfice d’exclusivité alors qu’elle n’était pas prévue au contrat. La Cour s’est fondée sur le devoir de loyauté et de coopération du franchiseur ainsi que sur les informations contenues dans le DIP qui indiquait un marché difficile, peu dynamique. La loyauté du franchiseur est mise à mal dès lors qu’il intègre dans son réseau un autre point de vente dans la zone géographique de son franchisé en difficulté alors même qu’il existait une situation économique difficile antérieure au contrat.

Si le contrat est assorti d’une autre clause d’exclusivité, la durée sera automatiquement la même et limitée à 10 ans (art. L330-2 du code de commerce).

Italie : L’exclusivité territoriale comme celle d’affiliation doivent être écrites à peine de nullité (art. 3, alinéa 4, c) de la loi n°129 du 5 mai 2004).

Dans le cas d’un contrat de franchise sans exclusivité territoriale, le Tribunal de Milan a reconnu le 27 janvier 2017 que le franchiseur violait son obligation de bonne foi en ouvrant un point de vente concurrent à son franchisé dans la même zone territoriale et ce, même en l’absence d’exclusivité.

La jurisprudence italienne rejoint ainsi la jurisprudence française précitée en vérifiant les informations contenues dans le DIP et en faisant une même application combinée du principe de l’exclusivité territoriale et du devoir de bonne foi/ loyauté que doit observer le franchiseur.

B. L’obligation de non-concurrence post-contractuelle

France : La loi dite Macron n°2015-990 du 6 août 2015 codifiée aux articles L341-1 et L341-2 du code de commerce, applicable au commerce de détail, a modifié le champ d’application de l’obligation de non-concurrence post-contractuelle pour se conformer aux conditions imposées par l’article 5, §3 du Règlement n°330/2010 du 20 avril 2010 relatif aux accords verticaux et pratiques concertées.

Pour être licite, l’obligation restrictive doit :

– concernée les même biens et services prévus au contrat ;
– être limitée aux terrains et locaux à partir desquels l’exploitant exerce son activité pendant la durée du contrat ;
– être indispensable à la protection du savoir-faire ;
– être d’une durée maximale d’1 an après la fin du contrat.

La nouveauté principale réside dans la nouvelle définition plus restrictive de la limitation géographique qui n’est plus celle du territoire contractuel mais celle des terrains et locaux où l’activité est exploitée.

Cette disposition s’appliquant aux commerces de détail, son champ d’application divise actuellement la doctrine.

Italie : L’article 2596 du code civil, applicable à tous les contrats, prévoit que l’obligation restrictive doit être :

– écrite ;
– limitée à une zone déterminée ou pour une activité déterminée ;
– inférieure à 5 ans.

Ainsi et contrairement aux dispositions communautaires, la limitation du territoire et de l’activité n’est pas cumulative mais alternative et la durée est bien supérieure.

Toutefois, en vertu de la loi italienne n°287 de 1990 les règles communautaires prévalent sur les règles nationales de sorte que les tribunaux italiens dans le cas d’un contrat européen sont susceptibles d’appliquer la norme communautaire.

Par conséquent, compte tenu des différences entre les lois nationales et la norme communautaire, dans le cadre d’un contrat de distribution entre pays européens, il convient de s’assurer de l’efficacité de la clause de non-concurrence post-contractuelle et de la rédiger selon les règles communautaires.

Article paru dans la revue Journal du Management Juridique N° 63 de Mai-Juin 2018 spécial Droit de la Concurrence et distribution